Un château devient campus universitaire
En vente depuis des années, la propriété de Hauteville, au-dessus de Vevey à Saint-Légier, a trouvé un acquéreur. La famille Grand d’Hauteville l’a cédée à la Pepperdine University, une institution privée américaine, qui transformera l’édifice pour en faire l’un de ses campus européens prêt à accueillir ses premiers étudiants à la rentrée académique 2022. A découvrir.
Hauteville a pris son apparence actuelle en 1760. Pierre Philippe Canac, bourgeois lyonnais et huguenot, a alors fait transformer et agrandir l’ancien bâtiment afin d’édifier un château à la française, confié à l’architecte François Franque. Depuis le XVIIIe siècle, le domaine appartient à la même famille: les Canac, devenus Grand d’Hauteville. Chef-d’œuvre d’architecture, la demeure patricienne illustre le raffinement de l’époque. Elle s’entoure de vignobles et de champs sur une surface de 27 hectares; une allée bordée d’arbres centenaires mène au château. L’implantation du bâtiment offre de belles perspectives visuelles sur le lac de Genève et les Alpes. Si la propriété a fait l’objet de nombreuses restaurations, d’importantes dégradations se sont néanmoins produites, en particulier sur les façades. Afin de le protéger et d’accompagner les transformations, le domaine a été classé Monument historique d’importance nationale en 2019.
L’entretien de la propriété nécessitait des frais considérables. Décidée de s’en défaire, la famille Hauteville a toutefois renoncé à plusieurs reprises à des ventes, les projets n’étant guère compatibles avec le caractère historique du bien. Finalement, le programme du campus de Pepperdine University s’est avéré celui qui permettait de transmettre le patrimoine tout en offrant un nouvel usage au site. Cette Université américaine a son siège à Malibu, en Californie; elle se veut traditionnelle et respectueuse des valeurs chrétiennes. L’attrait pour un lieu empreint d’histoire et pour la valorisation du patrimoine a conduit l’Université à acquérir le site. La petite antenne qu’elle possède à Lausanne sera remplacée à terme par le campus de St-Légier.
Renouveau de la propriété
Le bureau Glatz-Delachaux, spécialisé en sauvegarde du patrimoine architectural, a été mandaté pour mener à bien les travaux. Les architectes travailleront en étroite collaboration avec le Service des monuments et sites du canton de Vaud et une commission d’experts. Le chantier de réhabilitation a débuté en mai: il portera sur le corps principal du château et certaines de ses annexes. Les riches fresques et décors intérieurs seront restaurés. «La principale difficulté réside dans la préservation des façades, précise Nicolas Delachaux. Elles comprennent des peintures en trompe-l’œil de style Louis XVI, qui se sont malheureusement détériorées au fil du temps. Un travail délicat, impliquant d’importantes études historiques, stylistiques et techniques, est en cours. La toiture est également en mauvais état».
L’installation d’un chauffage centralisé à plaquettes de bois est prévue dans la grange proche de l’entrée du domaine. Parfaitement isolé, l’ensemble bâti sera adapté avec subtilité aux normes en vigueur (feu, accès handicapés, etc.). Aucun parking n’est nécessaire, puisque la gare se trouve en face du château. Relevons enfin que la Pepperdine University a le souhait de s’intégrer à la vie locale : il est prévu que son chœur vienne donner un concert à Saint-Légier en 2021, le concert agendé cette année ayant été annulé en raison du Covid-19.
Vivre au château
Les 80 étudiants en Bachelor logeront et étudieront au sein même du château. Les anciens salons seront affectés à des salles de cours, petits auditoires et bureaux. La grande cave, avec la salle des pressoirs, sera transformée en lieu de réception. Les divisions créées par les anciens propriétaires seront supprimées, ce qui rendra à l’édifice son caractère d’autrefois. Les étudiants logeront de deux à huit par dortoir, avec des sanitaires à l’étage. Un ascenseur est prévu pour les personnes à mobilité réduite. L’orangerie (ancien manège) et bûcher accueillera le réfectoire, ainsi que sa cuisine en sous-sol. Trente étudiants en Master y logeront dans les combles et dans la partie bûcher. Ils bénéficieront de chambres individuelles, aménagées en toute simplicité. Au total, ce sera environ cent trente étudiants qui occuperont les lieux, ainsi que les familles des deux directeurs/surveillants.
par Véronique Stein
Article paru dans le Magazine immobilier.ch de juin 2020