Interview

Nouveaux défis, nouvelle présidence

Pénurie de logements, formation professionnelle, révision de la loi vaudoise sur l’énergie... Fabien Anex, récemment élu à la tête de l’USPI Vaud, va avoir de nombreux combats à mener durant son mandat et nous les détaille.

Fabien Anex, nouveau président de l'USPI Vaud
Fabien Anex, nouveau président de l'USPI Vaud - Copyright (c) USPI Vaud
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Pur produit joratois, né à Vucherens (VD), Fabien Anex s’est d’abord laissé tenter par un apprentissage chez Braillard Fers, une usine de façonnage d’acier d’armature à Moudon, puis par l’armée, avant de tomber dans le vaste monde de l’immobilier en 2003. Finalement conquis par son passage dans la régie Michaud & Burkhard (devenue M&B gérance immobilière), il abandonne alors ses ambitions de rejoindre la police de sûreté pour passer un brevet fédéral et devenir ensuite directeur de la régie en 2009.

À présent bien ancré dans l’immobilier avec 4000 objets sous gestion, il s’attèle, entre quelques sessions de rugby ou de marathon (dont celui de New York l’an passé), à défendre la profession. Au sein du comité de l’Union suisse des professionnels de l’immobilier Vaud (USPI Vaud, 110 membres et 334'000 objets) depuis près de dix ans, il compte désormais poursuivre sa mission en tant que président, siège qu’il vient fraîchement d’hériter de son prédécesseur: Louis Martin. Et pour l’occasion, il revient pour nous sur les principaux défis qui l’attendent.

Pourquoi avoir voulu reprendre la présidence de l’USPI Vaud?

Le comité a proposé ma candidature car j’ai toujours souhaité valoriser les compétences et la plus-value qu’apporte le conseil d’un professionnel, en particulier dans la gestion immobilière, et qui est indispensable à la valorisation d’un patrimoine immobilier. Une réunion de connaissances aussi diverses que complexes allant du financement d’un bien à l’établissement d’un bail à loyer, en passant par les choix techniques de travaux ou la planification fiscale.

Son but: valoriser la plus-value des professionnels de l'immobilier, défendre leurs intérêts et faire connaitre l'USPI Vaud

Quels sont vos objectifs durant ce mandat?

Trois axes principaux orientent ma présidence. Tout d’abord, valoriser la plus-value apportée par les professionnels de l’immobilier comme je le disais, tant dans le courtage que dans la gérance ou l’expertise. Également, défendre les intérêts des membres et leurs mandants sur les sujets touchant à l’immobilier (lutte contre la pénurie de logement, actions encourageant une transition énergétique efficace et concrète, allègement des processus administratifs coûteux et laborieux, etc.). Enfin, renforcer la reconnaissance de notre association auprès du grand public en tant que «label qualité» pour nos clients, propriétaires comme locataires, ainsi qu’au sein de la profession.

Concrètement, quels sont vos moyens d’action au sein de l’USPI Vaud?

La liste est longue mais avec l’avènement des technologies numériques et l’exploitation des données, on peut avoir l’impression qu’internet offre tous les outils pour gérer un patrimoine immobilier: établir un bail avec l’intelligence artificielle, vendre sa maison grâce à un algorithme, projeter la valorisation de sa parcelle par le biais d’un portail de comparaison de prix du marché, etc. Mais toute opération immobilière comporte son lot de risques, d’opportunités ou de contraintes qu’il faut savoir identifier et gérer.

Pour cela, notre principal pilier d’action est la formation continue. Notre école USPI Formation permet à nos membres de former leurs collaborateurs aux différentes disciplines de l’immobilier, offre des préparations d’examens d’études supérieures et propose aussi divers modules permettant d’approfondir ou d’élargir ses connaissances dans tous les domaines de notre branche. En outre, j’ai la volonté de poursuivre le programme de promotion de l’apprentissage instigué par mon prédécesseur.

Quant aux sujets politiques, cela passe par un engagement constant et investi sur les discussions du moment. En l’occurrence, le projet de révision de la loi vaudoise sur l’énergie nous occupe passablement. Nous sommes évidemment favorables à l’assainissement énergétique, mais assainir en 15 ans l’enveloppe thermique de 40’000 bâtiments et remplacer 60’000 chauffages (donc 16 changements de chaudières et 7 immeubles isolés par jour, y compris les week-end et jours fériés), paraît manifestement utopique.

La pénurie de logements est la crise qui préoccupe tout un chacun à l’heure actuelle, quelle serait la solution pour la résoudre selon vous?

Le développement et la promotion de l’offre de logements doivent, à mes yeux, être menés par l’économie privée. L’État doit mettre en œuvre des conditions favorables à cet effet, mais ce n’est pas son rôle de se substituer aux acteurs privés pour jouer les promoteurs. Les pistes d’amélioration sont multiples et les autorités doivent concentrer leurs efforts sur les mesures d’encouragement à la production de nouveaux logements. On peut espérer par exemple une amélioration des procédures d’autorisation de construire (il faut près d’un an pour obtenir un permis de construire dans certaines communes) et une ouverture à plus de compromis entre la protection du patrimoine, de l’énergie et de l’urbanisme.

Autre frein à l’investissement immobilier: les procédures d’opposition de plus en plus fréquentes aux projets de densification dans les milieux bâtis, même envers des projets écologiques et pensés durablement. La volonté du peuple de densifier les milieux bâtis (révision de la LAT 2013) et la multiplication des oppositions aux projets de densification démontrent la schizophrénie ambiante en matière d’aménagement du territoire. Et plus concrètement, l’effet du phénomène sociétal du «Nimby» (Not in my backyard ou «Pas devant chez moi») nous démontre que les solutions classiques d’aménagement du territoire, avec des zones légalisées, ne suffisent plus à assurer la sécurité du droit, ce qui retient les investisseurs. Le droit d’initiative populaire doit donc être cadré, afin que des plans légalisés ayant suivi tout le processus démocratique ne puissent plus être remis en cause par des citoyens.

Si le Canton veut conserver son attractivité et ambitionne d’abriter 1 million d’habitants d’ici une vingtaine d’années, il devra trouver des solutions permettant à l’économie privée de produire suffisamment de logements de qualité, tout en assurant une connectivité entre les lieux de domicile et de travail. Nous pouvons apporter notre pierre à l’édifice en ce qui concerne le logement, mais il faut nous donner les moyens de le faire...