La plus vieille maison de Vernier
Construite à la fin du XVIIIe siècle, la Maison Naville a abrité une des plus anciennes et innovantes écoles privées de Genève, l’Institut de Vernier, avant d’être rachetée par la commune qui en a fait sa mairie.
![Construite entre 1770 et 1772, cette maison de maître abrite la mairie depuis 1973. Construite entre 1770 et 1772, cette maison de maître abrite la mairie depuis 1973.](https://www.immobilier.ch/media/7641/albins-wiki-article-item-main.jpg)
Cinquième commune plus peuplée de Suisse romande avec 37’460 habitants à fin décembre 2023 (soit davantage que La Chaux-de-Fonds ou Sion), Vernier a connu un fort développement ces dernières années avec l’émergence de son nouveau quartier de l’Étang (870 logements).
C’est la Révolution française qui a fait de ce coin de territoire une commune au sens actuel du terme. Et c’est le 11 octobre 1816 qu’elle a été officiellement rattachée à Genève et à la Suisse, au même titre que les communes de Collex-Bossy, Grand-Saconnex, Meyrin, Pregny et Versoix.
Avant de devenir la mairie, cette maison était plus connue sous le nom de Maison Naville. Pourtant ce sont les descendants de la famille Diodati qui y ont fait bâtir une maison de maître en lieu et place de divers bâtiments à usage agricole.
![La maison Naville vers 1840. La maison Naville vers 1840.](/media/7640/ville-de-vernier.jpg)
Goethe y a séjourné
Goethe, accompagné du jeune duc Karl-August de Saxe-Weimar, fut reçu en octobre 1779 à Vernier par Antoine Josué Diodati (1728-1790), pasteur et bibliothécaire de l’Académie de Genève (l’entité qui deviendra l’Université de Genève en 1876). Le cadastre de 1806 rend compte d’importantes modifications effectuées sur la propriété des Diodati qui y ont vécu dès le XVIIe siècle. D’après l’historienne de l’art Christine Amsler, la Maison Naville aurait été achevée en 1771-1772 et non en 1762 comme on le racontait jusqu’à très récemment. Malheureusement, le nom de l’architecte ne nous est pas parvenu. C’était au départ une résidence de campagne, comme en possédaient d’autres familles genevoises enrichies par le commerce.
L'Institut de Vernier
Grevé d’hypothèques, le domaine est vendu en 1795 au négociant genevois Abraham Girod, lequel le revend à Jean-Jacques Ador en 1816. Ce dernier accepte de louer le domaine à François Naville, un pasteur qui souhaite se
consacrer à l’enseignement et à la pédagogie et y installer un institut pour jeunes gens. Dès 1820, ce dernier se porte acquéreur du domaine. De 1819 à 1855, la Maison Naville va accueillir l’Institut de Vernier. Comme l’a écrit l’historien Gabriel Mützenberg, François Naville va créer une école nouvelle avant la lettre, laquelle vise à offrir une formation complète et équilibrée de l’homme. En effet, on s’y soucie de leur éducation physique, ce qui est rarissime à l’époque, mais les enfants y pratiquent aussi le jardinage, le dessin, la musique. Ils effectuent des voyages pédestres tout en recevant une éducation intellectuelle de qualité. «À Vernier, ce qu’on déverse dans la mémoire doit avoir passé par le canal de l’intelligence». Un journal y est réalisé chaque vendredi dans lequel on y trouve des nouvelles de l’établissement. «L’élève est appelé à ne se comparer qu’à lui-même et se voit récompensé non pour son rang mais pour ses progrès». Les élèves de six à seize ans y sont généralement moins de 30. Cependant, dès juillet 1837, les comptes de l’Institut sont dans le rouge. En 1846, le fils de François, Louis Naville-Todd (1812-1895), futur maire de Vernier et député au Grand Conseil, reprend la direction de l’Institut, mais jette l’éponge dix ans plus tard.
C’est dans cette maison que fut célébré, dès 1819, le premier culte protestant de la commune après la démolition du temple en 1662.
Lieu de réunion des Naville
Durant la période allant de 1868 à 1874, la commune va louer la maison pour l’utiliser comme école enfantine. En 1906, la veuve de Louis Naville va y inviter tous les descendants Naville à s’y réunir à l’occasion du 400e anniversaire de l’accession à la bourgeoisie de Genève de cet ancêtre quasiment commun à la majeure partie des
Naville. À ce propos, l’exercice parviendra à être renouvelé pour le 500e anniversaire, en septembre 2006, qui permit de réunir quelque 320 descendants de Jacques Naville (écrit aussi Navilliouz ou Navilloz aux XVIe e t X VIIe siècles), certains venus tout spécialement du Paraguay et des Etats-Unis.
Établis à Paris, les deux descendants de la famille Naville, Pierre Naville-Kahn et Marc Naville-Dufayet, finirent par
vendre la propriété à la commune de Vernier en 1968 pour 1,5 million de francs. Peu après, la maison de maître et ses abords est classée, ce qui a permis d’obtenir une participation financière bienvenue de la Confédération et du Canton en vue de sa restauration complète par les architectes Virginio et Jacques Malnati. Ce ne sera qu’à partir de janvier 1973 que l’administration municipale y sera transférée. La salle des mariages ayant conservé son décor ancien, elle est très demandée. Devenu trop exigu, ce bâtiment n’héberge plus qu’une infime partie de l’administration.