Des gares en mutation
Symboles de rencontres, de séparations et d’ouverture au monde, ces lieux de passage n’ont plus la même fonction aujourd’hui et se repensent tous les uns après les autres. Retour sur ce phénomène de transition qui n’épargne aucun canton.
Qui n’a jamais entendu la fameuse phrase: «le train RegioExpress N°18461 entrera en gare voie 6»? Cette douce mélodie qui irradie des hauts parleurs sur les quais ferroviaires et tire de leur sommeil ses visiteurs de bon matin. Aujourd’hui territoire conquis par les pendulaires et les touristes, nos gares sont victimes de leur succès et peinent à contenir la foule aux heures de forte affluence.
C’est pourquoi, en Suisse romande, les transformations des gares de nos villes vont bon train. Que ce soit Fribourg (120 millions de francs investis et travaux jusqu’à fin 2025), Sion (6 millions de francs investis et travaux jusqu’à fin 2025), Lausanne (1,7 milliard de francs prévus et 12 ans de travaux) ou encore Genève (2 milliards de francs prévus et 9 ans de travaux), toutes entament le même processus.
Cap sur le renouveau
Un vaste chantier à l’échelle de la Romandie qui n’épargne pas le canton du Jura avec la gare de Delémont (7000 voyageurs quotidiens) qui vient de faire peau neuve pour devenir une vitrine des gares écologiques des CFF à l’échelle nationale. Initiées en 2021 et terminées cet été, des modifications exemplaires ont permis à cet endroit de devenir un havre de paix écologique. Et ce, grâce notamment à la plantation de verdure, l’installation de panneaux photovoltaïques, de recharges pour véhicules électriques, d’une désimperméabilisation des sols et la mise en place d’un chauffage aux pellets de bois. De quoi permettre aux CFF d’atteindre leur objectif (diviser par deux leurs émissions de gaz à effet de serre par rapport à 2018) d’ici 2030.
Du côté de Neuchâtel, une mue est également en cours. Des nouveautés telles que celles prévues pour la gare de Couvet (d’ici le milieu de l’année prochaine) ou la création de la halte ferroviaire à l’Orée-du-Bois (1350 habitants et 500 emplois) sont attendues. De même que la liaison directe entre La Chaux-de-Fonds et Neuchâtel qui avance à pas de loup. Mais ce qui préoccupe les autorités tout particulièrement c’est le réaménagement de la gare de Neuchâtel même, qui ne semble pas plaire aux commerçants et aux usagers à en croire la phase de test d’une année qui vient de s’achever. Les petites enseignes ne se sentant plus forcément à leur place dans ces hubs de transports. À l’image du fleuriste historique de la gare de Neuchâtel, Aubert Fleurs qui vient de mettre la clé sous la porte.
Une évolution interminable
Des changements qui ne font donc pas tous l’unanimité mais qui ont de tout temps marqué l’histoire de ces hauts lieux emblématiques. En effet au départ, les gares étaient le témoin d’une époque où le chemin de fer incarnait le comble de la modernité. Installé depuis une vingtaine d’années déjà sur le reste du continent, le train roule en Suisse à partir de 1847. Puis les gares deviennent le symbole d’une ouverture sur le monde, surtout pour les marchandises et les personnes fortunées...
Si les premières halles, modestes au demeurant, ressemblent au départ davantage à des anciens relais de poste, elles deviennent rapidement une place d’échanges et se dotent de buffets, de kiosques et d’horloges. Au fil du temps, les gares se démocratisent et se changent en véritables carrefours multimodaux puis, plus récemment en sorte de centres commerciaux d’un nouveau genre (car situées au coeur des villes ou villages). En cours de métamorphose, ces lieux de passage emblématiques se dirigent donc à présent tout droit vers une nouvelle fonction. Mais en attendant de savoir laquelle, il faudra encore faire preuve de patience et subir les nuisances générées par les divers chantiers... Phase de transition oblige!