Faune

Concilier habitat et hirondelles

Une association genevoise œuvre à la sauvegarde des hirondelles de fenêtre en milieu urbain en posant des nids artificiels en collaboration avec les propriétaires concernés. Notre récit.

En vol, l'hirondelle de fenêtre est reconnaissable par son croupion blanc pur.
En vol, l'hirondelle de fenêtre est reconnaissable par son croupion blanc pur. - Copyright (c) Michael Gerber / Birds-online.ch
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Le Groupe Ornithologique du Bassin Genevois (GOBG) a installé 50 nids artificiels sur des bâtiments au cœur de la ville, «dont 40 sont occupés cette année» se réjouit Géraldine Gavillet, secrétaire générale du GOBG. «Cela prouve que les hirondelles de fenêtre s’acclimatent bien en ville. Elles vont chasser dans les alentours du lac». Rappelons qu’un couple d’hirondelles aura besoin de 150’000 mouches pour élever sa nichée.

Hirondelle de fenêtre sur un nid naturel.diaporama
Hirondelle de fenêtre sur un nid naturel.

Menacées par la bétonisation

L’hirondelle de fenêtre, tout comme le martinet noir, fait partie des 50 espèces prioritaires en Suisse. Strictement insectivore, elle souffre de la forte diminution des ressources alimentaires (essentiellement des insectes volants) et des sites de nidification. D’autre part, les matériaux boueux nécessaires à maçonner son nid deviennent difficiles à trouver à cause du goudronnage des chemins et à l’occupation de l’espace, surtout en zone urbaine. Enfin, certains habitants tolèrent peu les salissures engendrées par les fientes. Pourtant, il existe des solutions.

Plusieurs cantons romands ont décidé d’agir depuis une décennie. Citons par exemple le Valais où Bertrand Posse, ornithologue à la Station ornithologique suisse, a collaboré avec la Ville de Martigny pour installer des nichoirs et des nids artificiels sur les bâtiments communaux. Ce dernier a même mis en ligne quatre capsules vidéo afin d’expliquer comment intégrer des nichoirs (www.youtube.com/watch?v=NV4hA59O1QM&t=69s).

Du côté vaudois, il existe des subventions pour la pose de nichoirs (65 francs), ainsi que la mise à disposition d’informations. Une fiche technique a été rédigée afin de simplifier la meilleure façon d’agir. Précisons que deux espèces d’hirondelles se retrouvent principalement en milieu bâti, les hirondelles rustiques et les hirondelles de fenêtre. La première se distingue par le fait que le dessus de son plumage est entièrement noir et que sa gorge est rouge foncé, tandis que la seconde a une gorge et un croupion blancs. Pour l’anecdote, on peut commander sur le site de la Station ornithologique suisse (www.vogelwarte.ch) un «nid artificiel pour hirondelle de fenêtre» au prix unitaire de 16 francs.

Installation de nids artificiels et planchette antisalissure sur l'école primaire de Gy.diaporama
Installation de nids artificiels et planchette antisalissure sur l'école primaire de Gy.

Le cas genevois

«Les salissures provoquées par les déjections en contrebas des nids posent parfois des problèmes de cohabitation entre l’oiseau et l’homme. Cependant il existe une solution simple: poser une planchette qui va retenir les déjections sous le nid» résume Géraldine Gavillet. C’est ainsi qu’à partir de 2015 le GOBG a commencé à poser des nids artificiels pour les hirondelles de fenêtre en fonction des opportunités. L’un des principaux enseignements, après près de dix ans de pratique en la matière, est le fait que les sites non-occupés naturellement ne sont que très peu colonisés par la suite. Voilà pourquoi, depuis 2023, le GOBG a décidé de n’installer ces nids artificiels que dans des sites déjà colonisés par les hirondelles ou géographiquement très proches d’une colonie existante.

Des exemples concrets

Parmi les exemples concrets d’intervention, il y a le cas d’une copropriété à Thônex (le Clos des Ecornaches), où une des propriétaires en a d’abord parlé lors d’une assemblée générale et où il a été décidé de faire venir Géraldine Gavillet avec l’administrateur de la Régie du Rhône pour présenter les enjeux liés à cette espèce. «C’était vraiment très constructif. Nous avons eu besoin d’une nacelle pour ce projet qui nous a permis d’installer 13 nids. Les résultats sont très encourageants puisque sur les 13 nids artificiels ajoutés à la colonie mixte existante, 10 ont déjà été occupés en 2023.»

Installation de nids au Boulevard d'Yvoy, grâce aux échafaudages en place pour les travaux.diaporama
Installation de nids au Boulevard d'Yvoy, grâce aux échafaudages en place pour les travaux.

Autre cas, le plus conséquent dans le canton du bout du lac: les immeubles de l’Hospice général au boulevard d’Yvoy. «La rénovation des cinq bâtiments menaçait une petite population relictuelle qui se reproduisait en nids naturels. Pour pérenniser cette petite population, et ce malgré les travaux prévus et de grande ampleur, le GOGB a conseillé les maîtres d’œuvre sur les bonnes pratiques (période des travaux au niveau des nids, hauteur des filets de protection pour permettre l’accès aux nids, etc.) et équipé quatre immeubles de nids artificiels. Au total, 50 nids artificiels ont été installés entre 2020 et 2023. Cette année, 40 couples se reproduisent dans les nids artificiels. Il est également intéressant de noter que les hirondelles de fenêtre ont recommencé à construire des nids naturels et à s’y reproduire. La croissance démographique depuis 2019 est fulgurante, passant d’un seul couple détecté à presque une cinquantaine! Il s’agit d’un exemple en termes de conservation de la biodiversité en milieu urbanisé», relate la secrétaire générale. «Nous n’avons eu aucun retour négatif. Les seuls problèmes désormais proviennent des pigeons qui viennent sur les balcons» nous déclare Jérémy Heitz, chargé de projets à l’Hospice général.

Citons encore le geste généreux de l’entreprise de construction genevoise Urbica qui, pour chaque chantier terminé, s’engage à contribuer à la création d’un nid d’hirondelle. Cette jeune société fondée par Romain de Rham et Albert Schurs soutient le GOBG depuis 2022.

Deux nids artificiels pour posés à côté d'un nid naturel d'hirondelle de fenêtre.diaporama
Deux nids artificiels pour posés à côté d'un nid naturel d'hirondelle de fenêtre.

Le projet d'un centre de réhabilitation à Etoy

Le Centre de soins de la Vaux-Lierre à Etoy suit exactement les mêmes objectifs que le GOGB avec le soutien d’une fondation privée, et ce depuis 2020. Les prémisses avaient été données lors de la mise en place de l’atlas ornithologique suisse 2013-2016 car il s’est avéré que les hirondelles et les martinets figuraient au nombre des espèces les plus menacées par la disparition de leur habitat dans la région de La Côte.

Le Projet Hirondelles La Côte a, d’une part, consisté à recueillir des données exhaustives sur les sites de nidifications, d’autre part à poser un maximum de nids et de nichoirs. Des appels à projets dans les médias locaux avaient été publiés afin de sensibiliser les propriétaires concernés.

Pour plus d’informations: www.gobg.ch